Quand la vie t’arrache à toi-même

Parfois, il faut être forcé à regarder.

Pas simplement voir.

Regarder.

Regarder sans pouvoir détourner les yeux.

Regarder jusqu’à ce que chaque mensonge tombe.

Jusqu’à ce que plus rien ne tienne.

Pendant des années, j’ai cru que la paix et la joie dans mon cœur suffiraient à transformer mon expérience humaine.

J’ai cru que c’était fait.

Que le pire était derrière moi.

Mais ce que l’on repousse ne meurt jamais.

Il attend.

Et il revient.

Ce que j’avais mis à l’écart a refait surface.

Violent.

Brutal.

Indiscutable.

Et j’ai compris une chose :

On ne force pas la beauté.

On ne force pas la grâce.

On laisse le vacarme fondre dedans.

Et parfois, la seule façon de la laisser fondre, c’est la souffrance.

Encore.

Et encore.

Jusqu’à ce que je n’aie plus d’échappatoire.

Jusqu’à ce que tout en moi implore enfin le silence.

Quand la vie est trop belle, je l’oublie.

Je me projette.

Je m’égare dans des rêves brillants.

Et, inévitablement, la souffrance revient m’arracher de mes illusions.

Regarder.

Encore et encore.

Observer sans intervenir.

Observer sans juger.

Observer sans vouloir réparer.

C’est là que la paix surgit.

Silencieuse.

Inaltérable.

Le témoin en moi ne désire rien.

Il ne veut rien changer.

Il laisse la vie faire sa danse.

Magnifique. Terrifiante.

Tout ça à la fois.

Parce que c’est ça, la vie.

Le jour et la nuit.

Le doux et le violent.

L’éclosion et l’effondrement.

Et si je veux arrêter d’être balayé par cette roue infernale,

il faut que j’arrête de courir après ou de fuir.

Il faut que je m’asseye au centre.

Pas comme un héros.

Pas comme un maître.

Comme un enfant qui n’a plus rien à défendre.

Et là,

là seulement,

la vie se dévoile.

Quand je cesse de vouloir autre chose que ce qui est,

la vie devient un miracle qui respire à travers moi.

Mais si je désire…

si j’exige…

alors tout se ferme.

La souffrance redevient reine.

Il n’y a rien à vouloir.

Il n’y a qu’à voir.

À laisser la vie se dérouler.

À s’émerveiller même dans l’horreur.

Même dans la perte.

Même dans l’absence.

Quand j’accepte d’être témoin,

je ne suis plus contre le monde.

Je suis traversé par lui.

Et ce n’est plus moi qui vis.

C’est la vie elle-même qui s’offre, immense, infinie, à travers mes yeux ouverts

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